Plus que jamais, les questions énergétiques sont au cœur des débats planétaires. Depuis plusieurs décennies, les scientifiques ne cessent de nous alerter sur les dangers que court notre planète. Notre population croît de manière exponentielle, face à des ressources limitées. Nous consommons toujours plus et mal. Si l’alarme déclenchée par les scientifiques nous semblait être un son lointain, nous nous rendons compte à diverses échelles que nous devons agir : la pression que nous exerçons sur l’environnement doit cesser.
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L’énergie est une question centrale et transversale pour demain. A l’échelle mondiale, le mix énergétique est dominé à plus de 80 % par les énergies fossiles, à savoir le pétrole et le gaz naturel. L’utilisation de ce type d’énergies nous détruit et ne nous offre aucun avenir. Plusieurs innovations ont été mises en place à la croisée entre énergies renouvelables et nouvelles technologies, afin de répondre à nos besoins énergétiques de manière durable. Quelles solutions avons-nous trouvées ? Où en sommes-nous de ces évolutions urbaines durables ? Quel visage ont-elles suivant qu’elles soient adaptées aux différentes échelles du territoire, de l’habitat et de l’individu ?
La crise énergétique généralisée
Les experts parlent de sixième extinction animale de masse : plus de la moitié des vertébrés ont disparu en quarante ans. Les pratiques agricoles et la présence humaine dans les milieux naturels sont les premières causes de destruction de leurs habitats et donc de leur disparition. La solution en termes d’aménagement territorial est de stopper l’étalement urbain, en densifiant les villes.
Nous sommes aujourd’hui environ 4 milliards de citadins et nous serons près de 6,5 milliards dans 30 ans. Il s’agit alors d’apprendre à bien vivre sur des petits espaces, vidés de toute pollution. En France, on estime que ce sont 50 000 personnes par an qui meurent à cause de la pollution. Penser l’énergie autrement c’est donc aussi penser à notre santé. Bien vivre ensemble dans la densité signifie également vivre dans une société équitable. En France, 5,9 millions de ménages qui sont touchés par la précarité énergétique.
L’équité, la densité et l’énergie, ce sont aussi des questions de mobilité. Recentrer localement le territoire permet de limiter les déplacements. Gérer les énergies liées aux déplacements réduit l’impact sur l’environnement. Trouver des énergies respectueuses, durables et illimitées en offre l’accès à tous.
L’Union européenne s’est fixée pour objectif de satisfaire 20 % de ses besoins énergétiques via les énergies renouvelables d’ici 2020. Dans ce cadre, la France doit passer les 23 %. Alors qu’à peine 10 % de notre production énergétique était liée à des énergies renouvelables, nous sommes arrivés à 14,2 % en 2013. Pour parvenir à ce résultat, les mesures énergétiques s’appliquent donc aux filières électricité, transports et chaleur (géothermie, biomasse, solaire, pompes à chaleur, part renouvelable des déchets). Comment cela se traduirait dans les changements de pratiques urbaines ?
Les innovations durables pour la mobilité
Les infrastructures liées à la mobilité ont quasiment toujours été attribuées à une seule fonction : le déplacement. Les routes ont un impact paysager lourd, occupent des parcelles importantes pour n’être que des zones de passage. La France, c’est 1 million de kilomètres de routes qui sont uniquement dédiés à la mobilité.
Les routes du Soleil
En décembre dernier, Ségolène Royal, Ministre de l’Environnement, de l’Energie et de la Mer, inaugurait la première route solaire française. Ce revêtement photovoltaïque, appelé Wattway et développé avec Colas avec l’Institut national de l’énergie solaire (INES), est actuellement en cours d’expérimentation sur un kilomètre de route départementale dans l’Orne. Le procédé se présente sous la forme de dalles collées sur la chaussée. L’encapsulage des cellules permet la circulation de tout type de véhicules. Les dalles, quant à elle, sont revêtues d’une résine qui procure les mêmes caractéristiques à la chaussée qu’une route classique.
On estime qu’un kilomètre de voierie permettrait de fournir l’électricité nécessaire à l’éclairage public d’une ville de 5 000 habitants. 20m² suffiraient à alimenter un foyer français moyen en électricité. Pour le moment, l’électricité produite sur les différents sites pilotes est renvoyée sur un bâtiment ou sur le réseau, utilisée pour alimenter une borne de recharge pour véhicules électriques, du mobilier urbain ou des panneaux de signalisation. De nombreuses applications sont encore à imaginer mais le graal serait, à terme, de parvenir à recharger les véhicules électriques par induction.
Les pistes cyclables solaires
La première expérience de revêtement photovoltaïque s’est déroulée aux Pays-Bas. Il y a maintenant deux ans, SolaRoad inaugurait la première piste cyclable solaire au monde.
C’est à Krommenie, près d’Amsterdam que le prototype a été testé pendant plus de deux ans. La puissance générée au cours des six premiers mois sur ces 70 mètres de piste suffisait pour alimenter un ménage d’une personne pendant une année entière.
La marche électrique
Loin de tous les préjugés habituels, Las Vegas est récemment devenue la ville laboratoire d’essais des énergies renouvelables, notamment via les énergies solaires. Récemment, la start-up EnGoPlanet a développé un système d’éclairage public photovoltaïque, activé par les pas des piétons.
Il s’agit d’un lampadaire sur lequel on place des panneaux photovoltaïques. Le système alimente les LED, qui éclairent l’espace public. La production de l’énergie profite aussi de la présence des nombreux piétons qui déambulent jour et nuit près de ces lampadaires. Des tampons cinétiques captent l’énergie produite par les déplacements des piétons. Chaque tampon est connecté à trois micro-générateurs qui délivrent entre 4 et 8 Watts par pas.
Réintégrer son habitat au cœur d’un écosystème
Selon l’INSEE, 5,9 millions de ménages français sont touchés par la précarité énergétique. Logements vétustes, chauffages de mauvaise qualité, dépenses énergétiques trop lourdes, divers facteurs sont liés à ces chiffres. L’habitat est devenu pour certains une menace dans notre écosystème : l’air y est en moyenne 8 fois plus pollué qu’à l’extérieur. Il s’agit alors dans ce domaine de trouver des solutions de chauffage efficaces, saines, écologiques et à prix réduits.
Réguler l’habitat, l’exemple de la résidence sociale à Montreuil
Le mois dernier, un nouvel immeuble social était inauguré dans la ville de Montreuil, près de Paris. Cette résidence n’est pas seulement un nouveau bloc de logements sociaux, c’est une résidence passive !
Les cinq étages sont construits sur la base d’une structure bois. Ce choix permet de réduire notre empreinte lors de la construction, mais aussi d’utiliser des matériaux écologiques et durables. Si le bâtiment est plus onéreux à la construction, sa rentabilité est rapidement visible. Les charges devraient être divisées par 2,5. Des interrupteurs éteignent tous les appareils en veille. Aucun appartement n’est doté de radiateur, pourtant la température minimum est de 19°C. Pour y parvenir, du triple vitrage a été installé avec des surfaces vitrées 20 % supérieures à celles utilisées d’habitude. Cela permettra d’optimiser l’apport du soleil. L’orientation du bâtiment a été pensée en ce sens. Les systèmes de ventilation ont également été conçus pour optimiser la maîtrise énergétique.
Les maisons-serres de Détroit
De son côté, face à l’abandon massif de son parc immobilier, Détroit cherche à reconvertir ses maisons. Parmi les initiatives notables, un architecte et un artiste ont travaillé main dans la main pour y implanter une serre. Les murs de la nouvelle structure ont été traités de manière naturelle avec une technique japonaise du bois brûlé, le shousugi ban. Celle-ci permet de protéger naturellement le bois par carbonisation. La pellicule de bois carbonisée va créer une protection contre les UV, les intempéries et les insectes, protégeant ainsi les fondations jusqu’à 80 ans. Une fois cette structure en bois mise en place, l’usage de la céramique intervient comme isolant autorégulateur. Une gamme de couleur est choisie en fonction de leurs propriétés. Leur positionnement en façade est calculé par rapport à l’inclinaison du soleil. Les carreaux noirs, par exemple, vont recevoir les rayons du soleil pendant l’hiver. Cette technique va permettre d’isoler le bâtiment tout au long de l’année.
Quand l’individu retrouve un équilibre naturel : le bien-être collectif
Les énergies renouvelables se définissent à des échelles différentes. Dans cet écosystème, l’individu est vu comme un acteur voire un producteur d’énergie via ses pratiques.
Au Nigeria, à Lagos, un terrain de football est désormais équipé d’un système permettant de transformer les foulées en énergie pour éclairer le stade. A Dordrecht, aux Pays-Bas, un carrousel un peu particulier a été mis en place. La journée celui-ci fonctionne grâce au soleil. Au cœur du système, des batteries sont installées. Celles-ci se rechargent grâce à l’énergie créée par les enfants qui s’amusent. La capitale chilienne, Santiago, accueille quant à elle, le cinéma de plein air chaque année. Dans le Parc des Sculpteurs, les cinéphiles ont appris à pédaler pendant la diffusion pour alimenter l’écran.
Les formes d’énergie renouvelable sont donc diverses et se trouvent dans les petits gestes du quotidien. Passer aux énergies renouvelables améliore l’environnement de tous. Se mettre à en produire améliore également son hygiène de vie et sa santé. De plus, les énergies renouvelables créent tout un nouvel écosystème qui permet à chacun de devenir acteur et de contribuer au bien-être collectif à sa manière. Ces énergies dites propres permettraient d’ailleurs à elles seules de nous alimenter. Cependant, leur émergence implique également des changements dans nos modes de vie qui requièrent, au-delà de la période d’adaptation, une véritable volonté individuelle et collective à abandonner certaines pratiques auxquelles nous sommes encore trop attachés.