Il est devenu l’outil de démonstration de la maire de Santiago du Chili et – Cocorico ! – il a été conçu par des Français : Santiago Deseado réunit dans un même outil quantité de données, permettant de comprendre en un coup d’œil le potentiel, les forces et les faiblesses de chaque quartier.
Densité de population, niveau de promiscuité des ménages, taille moyenne des logements, couverture du réseau mobile, ressources en eau, potentiel solaire, bruit émis par les véhicules, zones propices au phénomène d’îlot de chaleur… N’en jetez plus, vous trouverez dans ce logiciel 70 entrées possibles, pour visualiser en un coup d’œil les particularités des quartiers de la capitale du Chili. Mieux encore : pour comparer les performances, les données des villes de Paris et de Grenoble ont également été intégrées.
Savoir-faire français en matière de ville durable
Cet outil, qui a demandé près de deux ans de travail, a été développé sur une commande du ministère du Commerce extérieur pour illustrer le savoir-faire français en matière de ville durable. La commande initiale était de concevoir une maquette numérique 3D simulant un projet urbain réel, par le biais duquel seraient référencées toutes les entreprises françaises en lien avec la ville durable.
Aspect social, économique, sécurité, développement touristique… en tout, onze clés ont été définies.
Artelia, qui était l’un des deux démonstrateurs retenus par le ministère – l’autre étant Eiffage (voir encadré) –, a profité d’un cahier des charges très ouvert pour aller plus loin. Son groupement, composé de Veolia, de deux cabinets d’architectes (AS Architecture studio et Arte Charpentier) et de la start-up rennaise Siradel spécialisée dans la modélisation 3D, a travaillé en étroite collaboration avec la mairie de Santiago, sur place, pour fabriquer ce simulateur de la ville durable.
Un premier travail de réflexion a consisté à définir des clés avec l’équipe municipale : la ville durable ne se définissant pas uniquement par les questions environnementales, d’autres entrées, comme l’aspect social, économique, la sécurité et le développement touristique ont été intégrés. En tout, onze clés ont été définies.
La ville durable à la française : un modèle ?
La ville durable, ce concept qui concerne toutes les métropoles du monde : mieux vaut ne pas louper le coche, les grands groupes français l’ont bien compris. Les marchés de développement urbain sont en forte croissance à l’international, leur potentiel de progression supplémentaire est estimé à 50 milliards d’euros d’ici 2017 et à 100 milliards d’ici 2022.
Pour gagner en poids à l’international, le gouvernement a créé la marque ombrelle Vivapolis, destinée à fédérer les entreprises françaises et les élus locaux. L’objectif affiché est de parvenir à conquérir les marchés du développement urbain, en pleine expansion dans les pays émergents.
Après avoir financé les projets d’Eiffage et d’Artelia, les ministères de l’Écologie et du Logement ont lancé l’appel à projets « Démonstrateurs industriels pour la ville durable ». Cette fois-ci, l’idée est de valoriser l’émergence de projets urbains faisant appel à des technologies novatrices, mais qui requièrent également d’innover dans les processus d’élaboration, de mise en œuvre et de gouvernance. 16 lauréats ont été retenus au printemps dernier, comme le Lyon Living Lab, une plate-forme numérique dans le quartier de la Confluence qui assurera la collecte des données de consommation et de production de toutes les ressources (énergie, transport, eau, chauffage, éclairage public…) afin de permettre leur optimisation.
Un projet urbain scénarisé
Un gros travail de compilation de données et de mise en forme a été réalisé pour que le résultat soit visuellement « parlant ». « Nous avons essayé de faire un démonstrateur qui avance par étapes » explique Laurent Vigneau, directeur Innovation chez Artelia. « D’abord la contextualisation des choses, le diagnostic, puis une deuxième étape : réaliser un projet urbain qui tâche de mettre en dynamique les enseignements du diagnostic. Ensuite, enrichir le projet urbain avec l’intégration de l’annuaire des entreprises et leurs compétences. »
Grâce à notre outil, la maire a révisé ses ambitions à la hausse pour mieux imbriquer les projets à la ville, elle est en train de refinancer son projet.
Le projet urbain a donc été scénarisé, la maire Carolina Tohá Morales ayant demandé à travailler plus précisément sur l’hyper-centre, dont la particularité est d’être coupé en deux par une autoroute. « Suite à notre travail, la maire a stoppé les appels d’offres qui consistaient à couvrir l’autoroute pour se donner le temps de travailler sur les scénarios que nous lui proposions. Grâce à notre outil, elle a révisé ses ambitions à la hausse pour mieux imbriquer les projets à la ville, elle est en train de refinancer son projet » se réjouit Laurent Vigneau.
Une grande fierté pour l’entreprise : Carolina Tohá s’est approprié l’outil au point d’en faire son support de discours sur la ville, notamment lors de sa présentation à la COP21, à Paris. Les habitants de Santiago peuvent également utiliser l’outil, dont la partie « diagnostic » du simulateur a été mise en ligne sur le site de la ville.
Un contexte contraint
• Le projet : concevoir un outil 3D simulant un projet urbain réel.
• Le budget alloué : 2 millions d’euros, financés par l’État français au titre de la Fasep-Innovation verte (Fonds d’études et aide au secteur privé).
• La ville retenue : Santiago du Chili, 7 millions d’habitants, en forte croissance.
• Caractéristiques urbaines : forte pollution, ville scindée par une l’autoroute urbaine Panamerica, qui provoque une fracture urbaine et sociale.
• Les clés retenues : densité urbaine, équité sociale, économie et emploi, connectivité, identité de la ville, nature en ville, usage des ressources, qualité de vie, risques et climat, sécurité urbaine, mobilité durable.
L’outil (consultable en version allégée) : www.arteliagroup.com/stgo/index.html
Transformer l’essai : le pari de demain
Si d’autres villes s’emparaient de l’outil pour y ajouter leurs propres données, ce logiciel pourrait devenir un portail intéressant de comparaison des performances des métropoles à travers le monde. Pourtant, Artelia n’est pas parvenu, pour l’instant, à transformer l’essai et à travailler avec d’autres villes.
Ce logiciel pourrait devenir un portail intéressant de comparaison des performances des métropoles à travers le monde.
Aujourd’hui, Santiago Deseado est une vitrine utilisée dans les ambassades économiques françaises à travers le monde, un bel outil qui met en valeur les 130 entreprises françaises référencées.