Renault veut intégrer 20 % de plastiques recyclés dans ses prochains modèles. A condition d’augmenter les gisements de recyclé, limités.
« On ne substituera pas des matières recyclées à des matières premières vierges, si elles coûtent plus cher », explique JeanPhilippe Hermine, le président de Renault Environnement, mais dans les faits le plastique recyclé s’avère déjà de plus en plus compétitif pour les constructeurs automobiles. Aujourd’hui, 30 % de l’ensemble des matériaux qui composent les véhicules du constructeur français sont d’ores et déjà recyclés et Renault vise 33 % en 2016.
Cet objectif repose en grande partie sur un emploi plus intensif des plastiques recyclés. Ceux-ci comptent actuellement pour 11 % des plastiques que Renault injecte en moyenne dans chaque voiture. Leur part n’a cessé de progresser ces vingt dernières années. Elle est de 17 % pour le Captur, un des modèles les plus récents du constructeur qui a fixé la barre à 20 % pour les suivants.
Les vents sont porteurs. La réglementation fixe de nouvelles ambitions de recyclage, aussi bien de la part de Bruxelles (nouveau paquet économie circulaire d’ici à 2030) que de Paris (projet de loi sur l’économie circulaire et la transition énergétique). Le plastique recyclé coûte environ 10 % moins cher que le plastique vierge. De quoi donner des ailes à Renault. Lancé dans la course à l’allégement des voitures, le constructeur n’attend qu’une chose : augmenter ses commandes. « Nous pourrions passer de 50.000 tonnes à 90.000 tonnes de polypropylène recyclé par an en dupliquant son utilisation d’un modèle à l’autre », assure Jean-Philippe Hermine.
Sauf que l’offre n’est pas au rendez-vous. Près des deux tiers des approvisionnements de plastique recyclé de Renault proviennent de déchets de fabrication, contre 35 % issus de plastiques déjà consommés. C’est là où le bât blesse. « Seulement 16 % des plastiques des véhicules en fin de vie sont recyclés », indique le représentant de la marque au losange.
C’est pour combler une partie de ce vide qu’a été créé Indra, coentreprise de recyclage des VHU (véhicules hors d’usage) associant Renault à Sita. La filiale de traitement des déchets de Suez Environnement a, en effet, décidé de s’engager dans la fourniture de plastiques de « deuxième main », et pas seulement automobiles. Sita prévoit le doublement de sa production d’ici à cinq ans, via notamment ses partenariats avec les industries fortement consommatrices.
Actuellement, ses neuf usines spécialisées en Europe traitent 400.000 tonnes de déchets plastiques et en recyclent 130.000. « Nous n’en sommes qu’au début », estime Christophe Cros, directeur général adjoint de Suez Environnement responsable de l’activité déchets, ajoutant que le groupe « a les moyens technologiques et financiers » de réaliser son ambition.
25 % de déchets recyclés en Europe
L’Europe produit 25 millions de tonnes de déchets plastiques par an, dont seulement 25 % sont recyclés. Pour Sita, tout l’enjeu est de fournir une matière recyclée à un prix compétitif et de même qualité qu’une matière vierge. Christophe Cros veut donner de la « visibilité » sur les débouchés de ces plastiques recyclés pour justifier les investissements à consentir dans les centres de tri et de traitement. Dans cette optique, Suez Environnement inaugurera le 15 octobre son Plast’Lab, un laboratoire de recherche sur les plastiques recyclés. Le groupe, qui y a investi 1 million d’euros, mobilise également 35 millions dans sa future usine de polypropylène recyclé. Implantée aux Pays-Bas, celle-ci ouvrira fin 2015 et fournira 35.000 tonnes de matière par an.
Pour Jean Martin, président de la Fédération de la plasturgie, l’intérêt de la matière recyclé est en train de fléchir depuis quelques mois, car le coût de la matière vierge a baissé d’une petite dizaine de pour-cent. Cet obstacle pourrait être résolu par un peu de régulation publique. Il confirme également que la collecte et le recyclage des plastiques restent trop faibles pour offrir assez de matière aux transformateurs. Seule la filière du PET (bouteilles) a réussi à collecter et à réutiliser 50 % du gisement.
Source : LesEchos