L’économie circulaire est à la mode, nos déchets prennent de la valeur : dans le contexte d’une dépendance industrielle croissante vis-à-vis des matières premières, ils deviennent un gisement de ressources et d’emplois. Le secteur se structure et doit encore investir afin de diversifier les gisements traités…
Un potentiel économique à exploiter
L’économie du recyclage connaît un fort développement en Europe. La part de matières premières recyclées a dépassé les 45 % dans la sidérurgie mondiale et les 60 % dans l’industrie papetière. Les gisements du recyclage tendent à se diversifier pour faire apparaitre de nouvelles filières, comme celle du traitement des matelas.
Un potentiel de développement important se dégage des gisements encore inexploités et de l’amélioration du recyclage des terres rares ou métaux stratégiques. Selon le Commissariat à la stratégie et à la prospective, certains d’entre eux pourraient commencer à manquer dès 2025. C’est par exemple le cas du cuivre, l’indium et du gallium, utilisés dans les industries de pointe (téléphones portables, disques d’ordinateur, systèmes de navigation et technologies vertes notamment).
L’activité du recyclage devient en France une priorité environnementale. Le plan Recyclage et matériaux verts de La Nouvelle France Industrielle vise à exploiter la source d’emplois et d’attraction des capitaux étrangers qu’elle représente.
La France championne européenne de la collecte
Ces ambitions françaises partent sur de bonnes bases. La France affiche des taux de recyclage plus élevés que la moyenne européenne pour les emballages métalliques, le papier-carton et le verre en comparaison à ses à ses voisins européens. Ces scores, c’est à la REP ou Responsabilité Élargie du Producteur que nous les devons.
Elle engage les entreprises à financer la collecte et le traitement des marchandises qu’elles produisent ou distribuent, une fois ces marchandises arrivées en fin de vie. Ce principe simple « pollueur-payeur » concerne une vingtaine de filières.
Source : Ademe
Le système a profité au développement des industriels du recyclage qui se disputent un marché complexe. Plusieurs type d’acteurs coexistent et parmi eux quatre catégories se démarquent : les leaders du recyclage comme Paprec ou Derichebourg, qui collectent et traitent plusieurs types de déchets, les généralistes des déchets comme Veolia Environnement ou Suez Environnement, les recycleurs régionaux qui opèrent au niveau local et les mono-recycleurs qui se différencient de la concurrence.
La filière s’appuie sur une collecte efficace mais l’amélioration de sa performance nécessiterait l’activation d’autres leviers, notamment des leviers règlementaires et financiers.
Booster la valorisation et soutenir l’innovation
L’été dernier, la filière a contribué à l’élaboration du plan Recyclage et matériaux verts par la remise à Arnaud Montebourg d’une série de recommandations issue des groupes de travail pilotés par la FNADE (fédération des professionnels des déchets) et la FEDEREC (fédération des professionnels du recyclage). Les industriels de la profession y soutiennent une réduction importante des mises en décharge par voie réglementaire (-30% de déchets en 2020, -50% en 2025). Ils demandent également un renforcement de la valorisation énergétique des déchets, notamment via les combustibles solides de récupération (des combustibles de substitution dérivés des déchets industriels n’ayant pas pu être recyclés, comme les encombrants de déchèterie. Ils sont utilisés à des fins de valorisation énergétique en substitution des combustibles fossiles classiques).
Ces mesures permettraient d’augmenter les volumes recyclés, mais pour traiter ces derniers et accroître sa performance, l’industrie doit encore se moderniser. Selon Michel Valade, président de la FNADE, 5,6 milliards d’euros d’investissement seront nécessaires d’ici 2025. Des apports en fonds propres seraient à mobiliser sur de longues durées pour développer des technologies complexes. De tels apports sont difficiles à obtenir dans un contexte où l’investissement privé se tarit et dans lequel les dossiers les plus innovants sont perçus comme les plus risqués.
Résultat, la France se classe 6ème mondiale en matière de recherche et développement, avec de nombreux brevets déposés, mais tombe au 22ème rang sur la thématique d’innovation.
Au-delà des innovations capitalistiques, un peu plus de stabilité sur les prix des matières premières ou a minima de visibilité favoriserait les prévisions et la performance des industriels. Des pistes d’outils et mécanismes d’ajustement sont étudiés au niveau européen : la couverture du risque prix ou la création des certificats de recyclage négociables font partie des options envisagées.
La filière du recyclage porte ainsi un potentiel d’innovation et de développement économique prometteur. Son développement et sa performance restent néanmoins à apprécier au regard du cycle de fin de vie des produits. Le recyclage et la valorisation rallongent certes le cycle de vie mais ils représentent aussi des postes de consommation énergétique à comptabiliser sur un bilan écologique complet…Une projection à long terme à articuler sur une visibilité économique réduite.
Source : EnergyStream