Un consortium regroupant Bouygues Immobilier, Microsoft et deux startups a mis au point un démonstrateur permettant les échanges d’énergie entre appartements, qu’il espère tester in situ à Lyon Confluence.
Depuis quelques mois, la blockchain est partout débattue comme un élément majeur de disruption de nombreux secteurs d’activité, finance en tête. Mais c’est dans tous les domaines où elle peut se substituer à un tiers de confiance qu’elle a un rôle à jouer.
Dans ce contexte, alors que les projets d’autoconsommation et de solidarité énergétique entre consommateurs progressent rapidement, rien d’étonnant à ce qu’elle investisse le secteur de l’énergie. L’initiative menée à New York dans le quartier de Brooklyn a défrayé la chronique au printemps dernier. Grâce à TransActive Grid, les habitants d’un côté de la rue peuvent désormais vendre l’électricité produite par les panneaux solaires posés sur leurs toits à leurs voisins du trottoir d’en face.
Plus récemment, la plateforme française de crowdfunding dédiée aux énergies renouvelables Lumo avait annoncé rejoindre une initiative internationale mêlant énergie solaire et blockchain pour donner de la valeur à une cryptomonnaie solaire.
Les nouvelles perspectives de l’autoconsommation
C’est aujourd’hui Bouygues Immobilier qui se lance sur le créneau, allié à Microsoft ainsi qu’à Energisme et Stratumn, deux startups spécialistes respectivement de l’énergie et de la blockchain. Le consortium surfe sur une ordonnance sur l’autoconsommation publiée en juillet dernier, favorisant les échanges d’énergie entre compteurs via le réseau public.
« Nous nous sommes livrés à une véritable course de vitesse pour mettre au point un prototype à temps pour la Blockchain Hackademy (organisée par Microsoft les 4 et 5 octobre derniers, ndlr) », témoigne Olivier Sellès, Responsable Innovation et Smart city de Bouygues Immobilier. Dans un deuxième temps, après une présentation sur le salon Pollutech qui se tient à Lyon fin novembre, l’objectif est de convaincre l’Institut pour la Ville durable (IVD) de le mettre en place au sein d’un de ses démonstrateurs situés dans l’éco-quartier de Lyon Confluence. Ce réseau de supervision d’échanges d’énergie doit permettre à des producteurs-consommateurs de suivre directement et localement leurs échanges.
Sensibiliser les clients à la consommation locale
« Aujourd’hui, lorsque vous êtes équipé de panneaux solaires, vous ne pouvez pas connaître la part d’énergie verte que vous consommez réellement », rappelle Olivier Sellès. A l’inverse de l’approche new-yorkaise où ce sont les transactions financières qui sont mises en avant, pour le consortium français, il s’agit avant tout de sensibiliser les clients à l’aspect local de leur consommation. « L’objectif, c’est que la mise en place de ce système ait un coût négligeable et puisse être intégrée au produit sans surcoût pour l’occupant », précise Olivier Sellès. Le système présente un intérêt en termes d’image pour le promoteur qu’est Bouygues Immobilier. « Nous n’avons pas mené d’étude de marché pour mesurer l’intérêt que cela représente pour les occupants », reconnaît-il. Mais ça n’est généralement pas pertinent pour des innovations de rupture. »C’est d’abord dans le parc social que le prototype doit être mis en oeuvre. La proximité entre le bailleur et les habitants y est plus grande, et on y observe une plus grande variété de courbes de consommation, notamment du fait d’un pourcentage plus important de la population qui travaille en horaires décalés.
A quand un TURPE régionalisé ?
Les échanges d’énergie sont prévus pour avoir lieu entre les appartements d’un même immeuble. Pour sauter le pas des échanges entre différents bâtiments (comme à New York), et envisager d’étendre le principe à un quartier entier, il faut encore attendre la sortie du Tarif d’Utilisation des Réseaux Publics d’Electricité (TURPE) autoconsommation, inférieur au TURPE national. Celui-ci doit permettre de réduire la facture de ceux qui consommeront leur propre électricité, sans supprimer complètement leur contribution à l’entretien des réseaux. Mais de nombreux acteurs plaident en faveur d’une régionalisation de ce TURPE prenant en compte les différences de production liées à l’ensoleillement. Ils craignent en effet que dans les régions les moins bien pourvues, le TURPE autoconsommation ne constitue pas une incitation suffisante.