La nécessité d’un développement plus durable est désormais une évidence aussi bien pour les entreprises que pour la société. L’économie collaborative propose un modèle de production et de consommation basé sur le partage qui pourrait bien permettre cette transition. Assiste-t-on à la naissance de la prochaine révolution industrielle ?
La tragédie des communs décrite par Garrett Hardin est aujourd’hui une réalité. Nous produisons et consommons des quantités tellement importantes de biens de consommation que les ressources viennent à manquer, et que l’environnement naturel est profondément déséquilibré par nos activités. Et surtout, nous sommes loin d’être efficients dans nos modes de consommation.
Un exemple ? En Europe, on dénombre entre 5 et 7 voitures pour 10 habitants… et ces voitures sont à l’arrêt 89% du temps. Quand elles roulent, c’est souvent pour transporter une seule personne. Trop de voitures, trop peu utilisées et trop mal utilisées, laisse un immense potentiel non exploité.
C’est sur la base de ce constat que se sont développées récemment les entreprises les plus dynamiques dans le secteur de la mobilité. Uber, Blablacar ou Koolicar par exemple, proposent chacune à leur manière une façon d’utiliser ce potentiel, en partageant les véhicules existants pour nos transports.
C’est ce que l’on appelle l’économie collaborative : au lieu de consommer chaque produit de façon individuelle, l’idée est de partager l’utilisation, de mutualiser les produits, les infrastructures et les plateformes, pour une économie basée sur le partage.
Ce qui peut sonner comme une utopie bienveillante digne de Robert Owen est pourtant une réalité économique, non seulement très concrète, mais surtout très dynamique.
Le marché mondial de l’économie collaborative devrait connaître une croissance de 2100% d’ici 2025
Outre sa voiture, on peut aujourd’hui partager son logement (Aibnb), louer ses vêtements (Poshmark)… Plus étonnant, on peut partager son wifi (Fon) et même l’énergie solaire (Yeloha).
Bref, l’économie collaborative est en plein développement, et PwC estime que le marché mondial pourrait croître de 2100 % dans les 10 prochaines années. Vous avez bien lu : le marché qui représente déjà 15 milliards de dollars aujourd’hui pourrait multiplier sa valeur par plus de 20 et atteindre 335 milliards en 2025.
Cela représente plus de 25% de croissance annuelle. Certains secteurs comme la finance collaborative sont appelés à croître de plus de 60% par an. L’économie collaborative semble donc devenir le nouveau business model qui fonctionne. La preuve ? Le succès du festival OuiShare Fest à Paris qui rassemblait les acteurs de l’économie collaborative avec plus de 180 intervenants et 50 nationalités représentées.
Les millenials et le big data mènent l’expansion de l’économie collaborative
Rien d’étonnant à y regarder de plus près : l’économie collaborative est en train de trouver dans les nouvelles technologies, un formidable vecteur de diffusion. La génération des millenials, acquise à une gestion instantanée et digitale des choses n’a aucun problème à utiliser son smartphone, la localisation GPS et les algorithmes des nouvelles applis afin de trouver tout de suite un produit ou un service à louer, qu’il soit offert par une entreprise ou par un particulier.
Grâce à cette nouvelle tendance de l’économie collaborative, il y a une réelle opportunité pour notre modèle économique d’évoluer. On peut y voir un moyen de transformer un peu de notre nature consumériste pour la rendre plus durable, en offrant à chaque produit plusieurs vies et en mutualisant les services.
Comment réguler l’économie collaborative ?
S’il y a lieu d’être enthousiaste, il ne faut pas être aveugle face aux problèmes posés par l’économie collaborative. La polémique d’Uber l’illustre d’ailleurs parfaitement. Il est clair que si un particulier et une entreprise offrent chacun un même service, l’entreprise qui paye des taxes sur son activité et est régulée par la loi n’est plus compétitive face au particulier qui n’a qu’à déposer une annonce sur son téléphone. L’économie collaborative porte en elle certains questionnements comme comment partager la valeur, comment s’articuler aux organisations et entreprises qui ne partagent pas leur modèle ou comment gérer la notion de travail et de précarité ?
Pour ces raisons, il faut une régulation intelligente de l’économie collaborative. Amsterdam par exemple a récemment légiféré sur la question d’AirBnb, en encadrant la pratique du partage de logement. Il est désormais interdit de « partager » son logement plus de 2 mois par an, ce qui reviendrait de fait à gérer un véritable hôtel.
Si les gouvernements sont capables de proposer de telles régulations sans tuer l’innovation profonde qui se cache dans le modèle de l’économie collaborative, il y a là la base d’un véritable changement de paradigme économique.
Les entreprises sauront-elles se saisir de ce changement ? Possible : lors du Business Climate Summit, Xavier Huillard, PDG de Vinci décrivait comment il était possible de mutualiser l’utilisation des bâtiments des entreprises, par exemple en les louant à bas prix aux heures où ils sont vides.
L’économie collaborative… une idée qui permettrait au business d’être plus responsable sans perdre de vue ses profits.
Source : eRSE