Le groupe a signé un accord sur trente ans pour traiter les eaux usées d’une cokerie.
Il espère ainsi surfer sur le probable virage écologique chinois.
Il n’y a pas que le peuple chinois qui souhaite ardemment que se concrétise le virage écologique promis par Pékin. Dans les entreprises positionnées sur ce créneau également, l’espoir est palpable. Veolia, le leader mondial des services environnementaux aux collectivités, entend bien profiter de cette mutation pour enclencher une nouvelle phase du déploiement de ses activités dans la deuxième économie mondiale. Une phase dans la droite ligne des orientations stratégiques annoncées par Antoine Frérot, le numéro un du groupe : au-delà des collectivités, ce sont, cette fois, les industriels en manque d’expertise environnementale qui pourraient être intéressées par les prestations du groupe hexagonal.
Entre crainte des conséquences politiques de la crise écologique et besoin de respectabilité internationale, les autorités centrales chinoises sont en train d’accroître la pression sur leurs industries. De nouvelles normes d’émissions de polluants ont été mises en place. « Les usines qui sortent de terre doivent être propres et les anciennes ont besoin d’être mises à niveau », résume Régis Calmels, qui dirige les opérations asiatiques du groupe. Veolia, qui avait déjà quelques activités industrielles dans le pays (dans les secteurs du raffinage et de la chimie), vient donc de s’associer avec le groupe Tangshan Iron & Steel, filiale du géant chinois de la sidérurgie HBIS, autour d’un projet double qu’il développe. Un projet sur trente ans, dont le chiffre d’affaires espéré sur la période sera de 390 millions d’euros. « Cela équivaut approximativement au traitement de l’eau d’une ville de100.000 habitants en France », explique Régis Calmels.
Concrètement, il s’agit de s’associer à la fois pour une usine de production de coke et pour un centre de liquéfaction du gaz. Au total, le groupe a été sollicité pour traiter environ 90 mètres cubes d’eaux polluées par heure. Des eaux lourdement chargées en phénol, qu’il devra nettoyer, et dont 60 % des volumes devront pouvoir être réutilisés pour le cycle de refroidissement de l’usine. « C’est un ensemble intéressant parce qu’il nous permet de nous positionner sur le secteur minier, la sidérurgie, et également le traitement des hydrocarbures », juge Régis Calmels. C’est surtout, veut-il croire, un coup important dans le « jeu de go stratégique chinois ».
Partition délicate
Un jeu de go qui consiste, pour chaque étape, à bien choisir ses cibles. Dans le traitement de l’eau, le groupe avait obtenu, il y a longtemps, des concessions pour des villes majeures (Shenzhen et Pudong à Shanghai). « Le but était d’acquérir nos lettres de noblesse et de nous faire accepter », explique le responsable qui veut croire que cette mission a été remplie.
Les événements d’avril dernier, dans la ville de Lanzhou où Veolia traite les eaux usées en partenariat avec la municipalité, sont venus rappeler l’extrême prudence avec laquelle doit se jouer la partition chinoise. Mis en cause dans une affaire de pollution des eaux au benzène, dont la faute ne lui incombait pas et dont la mauvaise gestion était d’abord le fait des responsables de la ville, le groupe a dû gérer, malgré tout, une crise médiatique. Et parvenir à se dédouaner sans pour autant pointer du doigt, trop explicitement, les responsabilités locales. En Chine, la crédibilité est aussi affaire de discrétion.
Source : Les Echos