Les initiatives sur l’économie circulaire bouillonnent. Mais pour éclore, ce modèle ne pourra pas se satisfaire d’une juxtaposition d’expériences. Quelle est l’échelle territoriale la plus pertinente pour fédérer l’action ?
L’économie circulaire est porteuse d’un autre modèle de fonctionnement de nos économies, sobre en ressources, partenarial voire collaboratif, réduisant les impacts environnementaux. Elle constitue une opportunité d’économies, mais aussi de création d’activités et d’emplois : selon une étude de la Commission européenne de fin 2012, elle pourrait créer entre 200 000 et 400 000 emplois en France. Les initiatives dans le domaine se multiplient. De grandes entreprises font évoluer leur modèle économique : Xerox vend l’usage de ses photocopieurs plutôt que les machines elles-mêmes, Michelin commercialise, dans le secteur des poids lourds, des kilomètres parcourus plutôt que des pneus. De nombreuses PME, start-up, structures de l’économie sociale et solidaire se créent pour offrir services et idées nouvelles.
Les CCI sont sur le pont : la CCI Quimper Cornouaille, par exemple, porte un projet d’accompagnement à l’économie circulaire. Le congrès d’octobre 2014 de CCI France, l’établissement national fédérateur et animateur des CCI avait pour thème : « Entrez dans l’ère de l’économie circulaire ». Un recueil a été présenté, mettant en lumière de nombreuses actions de CCI en la matière. « Les CCI souhaitent prendre toute leur part dans cette nouvelle donne, en mobilisant leur savoir-faire et leurs outils pour aider les entreprises dans ces changements », souligne Philippe Dutruc, président de la CCI des Deux-Sèvres et élu référent développement durable à CCI France.
Un avantage et un inconvénient
Sur une cinquantaine de zones industrielles ou parcs d’activité identifiés par l’association Orée, l’application des principes de l’écologie industrielle et territoriale conduit à des symbioses industrielles (échanges de flux et mutualisation des besoins interentreprises). Ainsi, le Club d’écologie industrielle de l’Aube a permis l’utilisation de sables de lavage des betteraves de la sucrerie Cristal Union par Eiffage, en remplacement de matériaux de carrière pour le BTP. Le Club participe aujourd’hui à des réflexions sur la transformation de déchets du textile en matériau de conditionnement, sur la réutilisation de flux d’eau provenant de choucrouteries, sur de possibles synergies dans le vignoble champenois…
Similaire sur le principe, mais concernant un très large territoire (plus de 3700 km² sur trois départements), il y a le projet Estuaire de la Seine, dont l’Association écologie industrielle estuaire (AEIE) est la cheville ouvrière. À l’usage, il s’avère que le développement de cette approche à une échelle aussi vaste est à la fois un avantage et un handicap. D’un côté, il y a une réelle cohérence territoriale à l’action. De l’autre, un manque de disponibilité des données de base pour le diagnostic et une plus grande difficulté à la sensibilisation et à la mise en mouvement des acteurs : il faut alors définir des priorités parmi les thèmes et les secteurs d’expérimentation, et trouver des relais.
De multiples leviers d’intervention
Des collectivités de tous niveaux ont compris le fort enjeu de mise en cohérence et de coordination des interventions sur les territoires. Elles ont commencé à défricher ce champ. L’économie circulaire faisant appel à la connaissance mutuelle des acteurs et de leurs flux de matières, ainsi qu’à leur capacité à nouer des coopérations innovantes, l’approche territoriale constitue un passage obligé. D’ailleurs, les différents piliers de l’économie circulaire mobilisent de multiples leviers d’intervention relevant des politiques publiques : développement économique, politiques de l’emploi, de la formation, de l’insertion sociale, des transports, de l’aménagement du territoire, du développement durable, etc.
« L’économie circulaire est un moyen pour les territoires de travailler à leur résilience et à leur transition », note Alain Geldron, référent national sur les ressources et l’économie circulaire à l’Ademe. À tous les échelons territoriaux, des collectivités commencent à se mobiliser. L’Association des régions de France, avec l’Ademe, est ainsi à l’initiative d’un guide méthodologique du développement de stratégies régionales d’économie circulaire. Cet outil donne des directions pour définir une feuille de route adaptée au territoire. « Concrètement, les Régions apparaissent comme les acteurs aptes à pousser à l’écoconception, accompagner les chefs d’entreprises dans le développement de l’écologie industrielle, de l’usine du futur, favoriser les écomatériaux via la commande publique… », plaide Alain Rousset, président du conseil régional d’Aquitaine et de l’ARF.
Source : Journal des Communes