À Heidelberg, en Allemagne, le quartier “le plus propre du monde” verra sortir de terre ses deux derniers bâtiments en 2017. Panneaux solaires, peinture anti-pollution, végétalisation et mixité sociale sont les ingrédients de ce complexe immobilier inédit.
Deux fois le Vatican. C’est la surface de l’immense écoquartier dont la construction est en passe d’être achevée à Heidelberg, en Allemagne.
Si 80 % de ses habitations sont déjà sorties de terre, son complexe le plus novateur est encore en cours de construction. Il doit voir le jour au printemps. Baptisé Heidelberg Village, cet îlot composé de deux immeubles, est décrit comme “le plus grand complexe passif au monde”.
Pensés et conçus par le cabinet fribourgeois Frey Architekten, ses 162 appartements seront ouverts à tout type de personnes, qu’elles vivent seules ou en famille. Leur conception dite “sans obstacles” les rendra de surcroît accessibles aux personnes âgées ou handicapées.
Comme l’explique Qiaozhi Meng, porte-parole de la direction du cabinet d’architectes Frey, “la mémé moderne, le conducteur de porsche ou encore l’étudiant fauché”, en somme toute personne désireuse d’y vivre, peuvent le faire : Il suffit pour cela d’en faire la demande à la ville de Heidelberg, cette dernière disposant d’un budget d’aide au logement alloué par le cabinet d’architecture lui-même.
Pas uniquement une “classe de nantis”
“Plus que des bâtiments high-tech, nous voulons créer un espace de vie, qui répond aux problématiques sociales et environnementales actuelles : il ne s’agit pas de le rendre uniquement vivable pour une classe de nantis, mais pour tout le monde. Toutes ces personnes pourront alors expérimenter une nouvelle façon de mieux-vivre ensemble”, précise à We Demain Qiaozhi Meng.
Ce “mieux-vivre ensemble” sera expérimenté par au moins 200 personnes, réparties dans des appartements de une à cinq pièces. Le tout sur cinq à huit étages. Pour inclure les futurs résidents au processus de construction et donner plus de sens au travail de la centaine d’ouvriers actuellement à l’oeuvre, des repas communs (et gratuits !) sont organisés toutes les deux semaines par le cabinet d’architecture.
“Lors de ces rencontres, tous les sujets sont abordés. L’idée est de comprendre ensemble qu’il est possible de vivre de façon plus respectueuse des autres, mais aussi de notre environnement – et ce, sans gadget ou fioriture”, raconte Qiaozhi Meng.
Panneaux solaires sur les façades et le toit
Mais comment construit-on des bâtiments passifs efficaces, “sans gadget ou fioriture” ? Grâce, selon le cabinet Frey, à l’énergie du soleil. Plus de 750 m2 de la façade et 350m2 de toit seront composés de panneaux solaires. L’hypothèse des éoliennes, en revanche, n’a pas été retenue. Heidelberg étant située dans le sud-ouest de l’Allemagne, dans le Bade-Wurtemberg, ces équipements y sont moins efficaces, faute de vent. De plus, l’installation d’éoliennes au sein d’un parc résidentiel est particulièrement onéreuse.
“D’après nos études, les panneaux vont générer plus d’énergie que nécessaire à la consommation quotidienne. Le surplus sera stocké à l’aide de batteries, ce qui permettra de gérer les pics d’énergie en redistribuant l’électricité au moment opportun”, explique Qiaozhi Meng.
Vignes sauvages, glycines et chèvrefeuilles de Chine
Ce système devrait permettre d’utiliser moins de 15 kWh de puissance énergétique pour chauffer les appartements, contre 100 à 300 kWh pour un bâtiment conventionnel. Et l’été, pas besoin de climatisation : les bâtiments seront dotés d’un système de ventilation intelligent, tandis que l’ombre généré par les panneaux solaires limitera la température ambiante à 25 °C.
Une “température idéale” à laquelle contribueront également les jardins verticaux : vignes sauvages, glycines, chèvrefeuilles de Chine, mais aussi arbres fruitiers en espalier et plantations de kiwi recouvriront les façades. De quoilutter contre les îlots de chaleur, mais aussi piéger les polluants de l’air, et ainsi améliorer la santé des habitants. Le toit, lui aussi, sera végétalisé et accessible à tous, de même que les allées entre les bâtiments, où les habitants pourront cultiver des potagers.
Dernier détail, mais de taille : sous leur couche végétale, les murs extérieurs des deux immeubles seront recouverts d’une peinture “mange-pollution”. Composée de dioxyde de titane, elle transformera les oxydes d’azote, l’un des principaux polluants de l’air, en oxygène. Un processus chimique qui ne nécessite aucun apport en énergie, tout en limitant la fréquence des opérations de ravalement.