La métropole est la première de l’Hexagone à imposer une présence si importante d’arbres et d’arbustes pour toutes les nouvelles constructions. Objectif : rafraîchir la ville.
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Les feuilles d’un seul platane, étalées par terre, recouvriraient dix terrains de foot. Pas étonnant que les arbres fassent les meilleurs parasols, doublés d’un brumisateur naturel grâce à l’humidité entretenue par la végétation. C’est pourquoi la Métropole de Lyon vient d’intégrer dans son PLU – une première en France – un coefficient de végétalisation de 30 % qui s’impose à toutes les nouvelles constructions. Dont la moitié en pleine terre pour faire pousser de grands arbres : place à la canopée pour noyer la cité sous une trame verte. « Il faut fabriquer des mètres cubes de bois comme on construit des mètres carrés de plancher », affirme Alain Marguerit, urbaniste-paysager associé à de nombreux projets lyonnais. Pour obtenir l’effet de climatiseur, trois strates sont nécessaires – des graminées au sol, des arbustes à hauteur d’homme et une couverture foliaire – afin de favoriser les échanges entre l’air et l’eau dans la verticalité. « On peut gagner jusqu’à 10 °C de confort sans que cela se traduise sur le thermomètre », explique Karine Lapray, cogérante du bureau d’études Tribu.
L’agence conseille le Grand Lyon, pionnier dans le diagnostic et la prise en compte de l’effet « îlot de chaleur urbain ». La collectivité locale a mis en place un Observatoire du climat et cartographié les zones rouges, pour diagnostiquer les éléments « pathogènes » sur la température. Elle expérimente dans le quartier de Confluence, vitrine de la ville écologique, de nouvelles formes architecturales – plus ventilées, avec des surfaces « froides » – et des solutions de verdissement. Ces 150 hectares de friches industrielles en cours de réhabilitation sont le laboratoire d’un modèle à la fois compact et apaisé, qui innerve l’ensemble de l’agglomération. Parmi les premières mesures testées : des sols poreux qui laissent l’eau s’infiltrer par des noues pour reconstituer les réserves du sol.
« Désimperméabilisation »
Désormais, la politique de « désimperméabilisation » s’applique partout. Rue Garibaldi, un système de récupération des eaux de pluie non polluées – sous les voies piétonnes et cyclables – conduit même le flot jusqu’à une ancienne trémie routière convertie en réservoir de 30.000 m3, où les services des espaces verts viennent remplir leurs camions-citernes. « Mais, l’idéal, rappelle Alain Marguerit, c’est de pouvoir se passer d’arrosage, grâce aussi à de nouvelles méthodes culturales à base de compostage et de bois fragmenté. » Les incitations aux toits végétalisés contribuent moins à « brumiser » la ville qu’à améliorer l’isolation naturelle des bâtiments. Plus besoin de clim, moins de chaleur renvoyée dans l’espace public : c’est un cercle vertueux.
Autre restriction imposée aux promoteurs à Confluence pour favoriser la croissance de grands arbres : l’interdiction de construire des parkings souterrains qui débordent de l’emprise des bâtiments. En échange, la collectivité teste un parking mutualisé entre les résidents et les entreprises, qui se partagent ainsi 800 places à différentes heures de la journée… ou de la nuit. Il est aussi question d’utiliser les eaux d’exhaure des parcs de stationnement enterrés (pompées à longueur de temps et rejetées dans le Rhône) pour alimenter des bassins d’agrément. A l’image de la future allée de Fontenay dans le quartier de Gerland, une trouée arborée de deux kilomètres, le long d’un petit canal. « Un véritable tube de climatisation passive dans la ville, assure Bruno Charles, vice-président de la métropole chargé du développement durable. Sans négliger les solutions industrielles, les normes et labels des bâtiments écologiques, Lyon mise d’abord sur les éléments naturels pour se rafraîchir. »