Le recyclage de nos déchets ménagers est avant tout un sujet d’éducation civique et politique. En pleine semaine du développement durable, la possibilité technique de redonner une seconde vie à la plupart d’entre eux devrait nous permettre de réfléchir à deux fois avant de jeter n’importe quoi dans n’importe quelle poubelle. Par Geneviève Ferone Creuzet, cofondatrice et présidente de Casabee.
Les déchets domestiques, comme leur nom l’indique, sont les déchets du quotidien, ceux que nous produisons tout au long de l’année. Nous pourrions penser que cette proximité devrait nous sensibiliser à la fin de vie de tous les produits que nous déballons, et consommons. Or, la répétition et la familiarité de ces actes dans nos cuisines ne nous rendent pas forcément plus attentifs au sort de ces déchets, une fois soustraits à notre vue. Il est difficile de s’intéresser à ce qui se passe dans les intestins de nos sociétés, c’est-à-dire dans les coulisses des décharges, des incinérateurs, des filières de valorisation et de recyclage.
Construire une ville grâce aux déchets
Chacun d’entre nous devrait d’urgence effectuer une visite dans ces coulisses. La portée pédagogique est évidente. Nous serions à la fois étonnés des quantités de produits générées et surtout surpris de la possibilité technique de redonner une seconde vie à la plupart d’entre eux. Nous réfléchirons certainement à deux fois avant de jeter n’importe quoi dans n’importe quelle poubelle.
Savez-vous que nous pouvons construire des villes avec nos déchets ? La ville de New York en est un exemple pas forcement glorieux au temps où les déchets étaient déversés directement sur les rives de l’Hudson river. Des progrès ont été accomplis, nos déchets deviennent des ressources et constituent de nouvelles matières premières, prêtent à repartir dans un nouveau cycle de production. Comme dans le cycle de la nature. Sauf que l’espèce humaine est précisément la seule espèce à ne pas produire des déchets bio nourriciers. De lourds investissements sont nécessaires pour les valoriser et recycler avant de leur trouver une nouvelle affectation.
La France à la traîne
L’objectif européen est d’atteindre 50 % de recyclage en 2020 pour les déchets ménagers. Pour la France, les chiffres ne sont pas bons. Les Allemands et les Autrichiens affichent respectivement les meilleurs taux de recyclage de 63 % et 62 %. Autrement dit, plus de 60 % du contenu de leurs poubelles évite l’incinération et la mise en décharge, il est pour une part transformé en matériaux réemployés par l’industrie à la place des matières premières, et pour l’autre composté pour être réutilisé en engrais. La Belgique, les Pays-Bas et la Suisse affichent également des taux de recyclage élevés (plus de 50 %). La France se positionne à la traîne, avec seulement 37 % de déchets ménagers recyclés, en dessous de la moyenne européenne située à 40 %.
Au-delà de notre faible appétence culturelle pour les sujets environnementaux, cette place pourrait en partie s’expliquer par la taxe d’enlèvement des ordures ménagères à la française, un impôt local indépendant de la quantité de déchets produits. Cette taxe est liée à la surface cadastrale du logement et non à l’effort de tri réalisé en amont par les habitants.
Cercle vertueux
Les pays vertueux en termes de recyclage ont en revanche adopté la redevance incitative : plus on composte et plus on trie, moins c’est cher. Mais en France, à part quelques téméraires, les élus locaux préfèrent le confort d’un impôt local indifférencié. En attendant de convertir votre maire – et les industriels – aux vertus de l’économie circulaire, vous pouvez toujours adopter une poule, arme fatale 100 % naturelle pour faire maigrir votre poubelle.
Le recyclage de nos déchets ménagers est avant tout un sujet d’éducation civique et politique. De multiples études ont montré que plus un pays est éduqué, mieux il recycle.
A vos déchets, citoyens !
Source : La Tribune